Interventions des élu.es TCES - Conseil Municipal du 18 décembre 2023 - Débat d'Orientation Budgétaire

Publié le par Tarbes Citoyenne

Le budget que vous soumettez au débat ressemble aux budgets précédents et plus particulièrement au budget de l’année dernière. On voit même dans ce texte du Débat d’Orientation Budgétaire que vous venez de nous présenter des passages qui sont quasiment des copier-coller du précédent exercice.

Ce DOB intervient à mi-mandat et nous nous positionnerons donc dans ce cadre de bilan de mi-mandat et de perspectives pour les prochaines années. Si l’on en juge par votre communication offensive, ces derniers jours, sur les projets réalisés et ceux restant à réaliser, dans Tarbes le Mag ou dans la presse locale, il semble que vous abordez aussi ce DOB dans les mêmes perspectives.

La crise sanitaire semble être derrière nous et c’est une bonne chose. Les précédents budgets ont, nous semble-t-il, permis d’en amortir les effets. Par contre, les crises sociales, écologiques et démocratiques ne cessent de s’amplifier et ce budget, comme les précédents d’ailleurs, ne semble pas le prendre en compte.

Pour tenter de faire ce bilan budgétaire, nous retiendrons un chiffre, qui date de 2020, qui provient de l’INSEE et qui est donc difficilement contestable : le nombre de personnes vivant sous le seuil de pauvreté à Tarbes se situe aux alentours de 25% des ménages fiscaux. Ce chiffre a vraisemblablement augmenté depuis, mais gardons ce dernier pour illustrer notre propos. 25%, cela représente plus de 10 000 personnes. Cela représente plus de 10 000 personnes. Derrière ces chiffres, ce sont des personnes qui souffrent ou se retrouvent en difficulté, qui souvent ont des vies compliquées ou cabossées.

Que fait la municipalité pour améliorer le sort de ces concitoyens ? Quel message envoyé à travers ce budget (et dans les précédents d’ailleurs) permettraient à ces personnes d’entrevoir une lueur d’espoir et une amélioration substantielle de leurs conditions ?

Bien évidemment nous sommes parfaitement conscients que le contexte national n’est pas des plus favorables et que les différentes politiques des gouvernements successifs depuis de trop nombreuses années envers les collectivités locales n’ont fait qu’aggraver la situation budgétaire. Pour illustrer notre propos nous reprendrons à notre compte l’analyse d’André Laignel, vice-président de l’Association des Maires de France. Cette analyse était présentée dans le document du DOB à l’agglo TLP.

Lors de la présentation du projet de loi de finances au Comité des Finances Locales, le Vice Président André Laignel a commenté ce projet de loi de finances en indiquant que le supplice du garrot continuait. Il a ainsi fustigé l’absence d’indexation de la dotation globale de fonctionnement (DGF) sur l’inflation en indiquant que la baisse des moyens était une recentralisation rampante, constatant qu’à euros constants, ce sont 2,2 milliards d’euros qui sont retirés aux collectivités locales. Il a d’autant plus regretté cet état de fait que l’Etat demande aux collectivités locales de prendre en charge de nouvelles dépenses (plan chaleur, plan handicap, plan petite enfance…) alors que les nouvelles normes imposées aux collectivités locales ont coûté en 2022 selon le Conseil National d’Évaluation des Normes 2,5 milliards d’euros.

Nous continuons, pour notre part, à considérer que, malgré ces contraintes, la préparation d’un budget maintient des marges de manœuvre. Le vote d’un budget est un acte politique majeur au cours duquel des choix doivent être tranchés. Nous sommes conscients qu’une municipalité ne peut pas tout, mais qu’elle pourrait au moins constituer un bouclier pour protéger au maximum nos concitoyens des politiques gouvernementales et des aléas de la vie.

Vivre sous le seuil de pauvreté n’est pas qu’un pourcentage ou un revenu impossible à atteindre. Cela a des conséquences directes sur les gens. Concrètement, cela signifie des difficultés à se loger, à se nourrir, à se soigner, à se chauffer ou à faire face aux factures d’énergie toujours plus hautes, à se déplacer, à avoir accès à la culture. Toutes ces difficultés étant imbriquées les unes aux autres, nous pourrions améliorer les choses en proposant une politique globale qui devrait retrouver des implications concrètes dans la construction du budget.

Au-delà des différentes crises évoquées plus haut, une crise sans précédent du logement semble pointer : des taux d’intérêts qui augmentent, des banques qui ont de plus en plus de mal à prêter. De nombreux logements invendus. Les observations que vous faites pour la fin 2023 et les prévisions pour 2024, sur les droits de mutation semble le confirmer. Nous devons absolument anticiper et proposer une véritable politique du logement au niveau municipal. Plusieurs études convergent pour démontrer que l’absence de logement ou le mal logement est la première source d’exclusion et que le seul fait d’agir sur cette variable en trouvant un logement décent pour tous améliore les conditions d’existence des plus démunis. Plusieurs expérimentations «un toit d’abord » ou « un chez soi d’abord » dans des collectivités ont connu un franc succès, comme chez nos voisins palois, par exemple.  Au-delà des simples aides pour rénover et isoler les logements les plus vétustes, nous devons aller plus loin. Le taux de vacance des logements est très important dans notre ville (entre 4000 et 5000). De nombreux logements sont vacants à la SEMI alors que nous en sommes actionnaire majoritaire. Nous aurons, sans doute, l’occasion en 2024 de revenir sur l’état général du parc locatif de la SEMI. Nous recevons de nombreuses plaintes de locataires à ce propos. Nous pourrions, dans un premier temps, nous servir du produit de la taxe sur les logements vacants pour entreprendre des premières actions. Il faudra d’ailleurs faire un premier bilan précis de la mise en place de cette taxe. Nous avons besoin de logements d’urgence, pour les familles en difficulté, les femmes seules victimes de violence, les sans domicile fixe et les mal logés. Le permis de louer, que notre liste proposait en 2020, et que vous aviez évoqué il y a quelque temps, pourrait permettre de traiter les problèmes les plus urgents.  A l’image du Président Macron, en 2017, nous pourrions nous fixer comme objectif à Tarbes de ne plus avoir de SDF dans nos rues et que le logement devienne une priorité municipale de cette fin de mandat.

- les factures énergétiques et de chauffage pèsent de plus en plus dans le portefeuille des plus démunis. Là aussi des collectivités ont pris cette question à bras le corps en créant des régies publiques locales d’électricité, de chauffage ou de production d’énergies renouvelables. La ville de Mont de Marsan a d’ailleurs fait ce choix de régie publique pour le chauffage urbain et la géothermie. Une réflexion et des projets, autour de ces questions, ont actuellement lieu au sein de l’agglo TLP. La municipalité devrait y participer de tout son poids afin que ces différents projets puissent avoir directement des conséquences positives pour les habitants, sur leurs logements et non pas seulement en direction des bâtiments publics. La gestion en Régie permettrait à la puissance publique de garder la main sur cette question énergétique qui prendra, à coup sûr, une importance accrue ces prochaines années.

Malheureusement, même les besoins les plus élémentaires sont durement impactés par la crise sociale en cours. Se nourrir décemment est devenu de plus en plus difficile et est maintenant exclu pour de nombreuses familles. Pour certaines de ces familles, la cantine scolaire reste le seul endroit où leurs enfants pourront bénéficier d’un repas équilibré dans la journée. Dans le DOB, il est noté qu’une réflexion doit être engagée sur l’augmentation du prix des repas. C’est un mauvais message envoyé aux familles. Nous devons tout faire pour garantir un prix stable pour les familles les plus en difficulté. Dans ce domaine aussi, de nombreuses collectivités se posent la question de la gratuité des cantines scolaires, au moins pour les plus défavorisés. Elle doit aussi s’accompagner par une réflexion sur des circuits locaux et courts, de qualité. Le succès des différentes ventes solidaires dans les quartiers populaires montrent que cette question reste fondamentale.

Se soigner devient de plus en plus difficile pour les tarbais. Avoir un médecin référent devient quasi impossible. Nous avions appuyé en 2020 votre volonté de création d‘un centre municipal de santé. Son succès, ainsi que l’équilibre de ses comptes, nous pousse à redemander ce que nous avions déjà demandé dès 2020 et que nous avons renouvelé de nombreuses fois : la nécessité d’ouvrir de nouveaux centres de santé communaux dans les quartiers prioritaires politique de la ville, qui ne soient pas de simples « boîtes à consultation » mais qui s’accompagnent d’une véritable politique de santé publique et de prévention. Nous restons opposés  à la fermeture programmée de l’hôpital de Tarbes et extrêmement inquiets des conséquences sur la population tarbaise. Pour la première fois, le service public de santé sera absent de Tarbes,  alors que les initiatives privées qu’on voit apparaître ces derniers jours ne pourront jamais remplacer la présence d’un hôpital public dans notre ville. L’accès aux soins, et notamment pour les plus précaires de nos concitoyens, en sera  très fortement dégradé.

Se déplacer, avoir accès à notre centre ville, s’avère aussi difficile pour les personnes qui habitent en périphérie de ce centre ville. Là aussi, et nous le réclamons depuis le début de ce mandat, nous ne pouvons pas passer à côté d’une réflexion globale sur les déplacements urbains : quelle place pour la voiture dans notre ville et dans le centre ville ? Comment accompagner, en lien avec la question précédente, le développement toujours plus grandissant du vélo et autres mobilités douces ? Nous attendons toujours avec impatience le plan vélo de la ville et nous pensons que nous avons déjà pris beaucoup de retard sur cette question. Concernant les transports en commun, nous souhaitons continuer  le débat au sein de notre agglomération, sur leur gratuité, mais aussi engager la réflexion sur un retour en Régie Publique (pour rappel, la DSP se termine en 2028). Avant de dire que c’est impossible, nous pourrions nous inspirer de l’agglomération de Montpellier qui mettra en place la gratuité totale de ses transports (tramway et bus) pour près de 500 000 habitants. Et enfin comment imbriquer ces différents moyens de déplacement ? Le projet de gare multi modale, maintes fois évoqué prendrait ici tout son sens.

Enfin un mot sur les services publics : nous avons coutume de dire que les services publics sont le patrimoine de ceux qui n’en ont pas. La défense et le développement des services publics devraient être une boussole incontournable de toute politique budgétaire. Là encore, la seule réflexion sur les services publics, dans le document du DOB concerne une éventuelle augmentation des tarifs.

En particulier, l’école publique devrait faire partie des premières préoccupations d’une municipalité. Ce n’est pas le cas. Vous nous direz que le budget de la Caisse des Écoles bénéficie de la plus forte subvention et que c’est un effort considérable pour notre commune. Nous vous rappellerons simplement que ce budget ne concerne que la cantine scolaire et le périscolaire, ainsi que le Projet de Réussite Éducative. Il ne concerne donc pas le budget de fonctionnement des écoles, dont la charge incombe aussi à la mairie. Sur ce point, nous actons positivement l’arrivée de l’équipement informatique nécessaire dans l’ensemble des écoles tarbaises pour 2024, en raccourcissant donc les délais initialement prévus. Pour mettre un bémol, nous rappellerons que nous n’avons fait que rattraper un retard de presque 10 ans par rapport aux écoles de la périphérie tarbaise.

L’accès à la culture est aussi une dimension importante de notre école publique. Il faut bien comprendre que de nombreux enfants, notamment dans les quartiers populaires, mais pas uniquement, n’ont accès à la culture que par le biais de l’école publique. Or nous avons appris, en fin de semaine dernière, que le service éducation a décidé de réduire drastiquement, dans certaines écoles le nombre de bus scolaires permettant ces sorties. Non seulement cette décision n’a jamais été présentée ni débattue en Commission Éducation, dans les conseils d’écoles ou avec les équipes enseignantes mais elle aura, là aussi, une conséquence directe : de nombreux enfants tarbais auront moins accès à la culture, aux musées, aux spectacles, aux expositions qu’auparavant. Le message envoyé est non seulement très mauvais mais parfaitement inégalitaire. De nombreuses familles ne compenseront pas ce manque culturel. Nous ne rentrerons pas dans les détails, ici. Nous souhaiterions que vous réunissiez, début 2024, les directeurs d’écoles, les représentants du personnel et les représentants des parents d’élèves pour éclairer tout ça. Il y a actuellement beaucoup d’incompréhensions.

Dernière question précise de notre intervention avant de conclure. Elle concerne aussi le service public, puisqu’elle concerne les agents municipaux : envisagez-vous, comme à l’agglo TLP, d’ouvrir des négociations pour mettre en place la prime pouvoir d’achat, promise par le gouvernement ?

Vous l’aurez compris, le débat d’orientation budgétaire et le vote du budget qui en découle devraient être, pour notre collectivité, l’occasion d’anticiper les différentes crises d’ampleur, sociales, écologiques ou démocratiques. A défaut de cela, nous les subirons et elles seront plus difficiles à surmonter pour la collectivité et pour nos concitoyens.

 

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